AIDE-MOI SI TU PEUX - Jérôme ATTAL

Stéphane Caglia n'est pas un flic comme les autres. Toujours prêt à dégainer un bon mot comme certains usent de leur revolver, il s'échappe de la violence urbaine qui est son quotidien en se réfugiant dans les années 80 (souvenirs d'un jeu télé, d'une super série ou d'un clip génial de Michael Jackson...).  Les eighties, seule période de sa vie où il s'est senti protégé et heureux. Traqué par un tueur à la solde d'une mystérieuse secte, il va devoir enquêter sur la disparition d'une jeune fille liée à une série d'abominables meurtres. Tamara, 17 ans, postait sur Youtube des reprises des chansons des Beatles. Là est peut-être la clé de l'énigme... Épaulé par une jeune inspectrice anglaise qui déteste les années 80, Stéphane Caglia réussira-t-il à résoudre son enquête avec pour seules références Corynne Charby, Valérie Kaprisky ou le capitaine Albator?

A chaque sortie annoncée d'un roman de Jérôme Attal, je me demande dans quel univers ce grand rêveur talentueux et attachant va m'emmener. 
Ici, dans le quotidien d'un flic quarantenaire râleur, idéaliste désabusé, et nostalgique, doté d'un sacré second degré (et d'une chouette sonnerie de portable ;-)) partant régulièrement dans d'exquises digressions. 
Ancien infiltré dans un organisme mafieux (nommé le Souterrain Stellaire), Stéphane Caglia, flic un peu brusque mais hyper sensible, craint un retour de bâton après son départ précipité. Il mène en parallèle une enquête sur la disparition d'une jeune ado esseulée au voisin énamouré et à la mère un peu paumée. 

Mais au-delà de cette enquête simple, somme toute bien menée, et à la conclusion qui interpelle (ceci étant, ce n'est pas un polar tortueux comme certains peuvent en chercher), Jérôme Attal nous embarque dans les années 80 de notre enfance (si vous êtes de la même génération que Jérôme, ce qui est - peu ou prou - mon cas...) par petites touches alternativement drôles et émouvantes.
Des années au souvenir plein de douceur, aux chansons/séries/jeux/dessins animés et émissions cultes. Des années trop vite passées, faites d'insouciance, quand les parents veillaient sur notre héro, quand aucune (ou peu) des injustices du monde ne l'avait encore atteint.

Jérôme Attal observe et dépeint la violence et les codes du monde avec son oeil poétique, sa fragilité de chevalier au grand coeur, sa fantaisie et sa mélancolie ultra-élégante, dans laquelle on entend les manques et les peines provoqués par la vie qui passe et prend les gens que l'on aime. 
Un roman décalé et touchant, encore et toujours.

"Ayant conscience de la dangerosité multiple du monde actuel, une agression, un accident, une mauvaise rencontre ou un attentat, j'étais devenu un véritable poltron concernant les gens dont je me souciais, me rongeant les sangs à chaque minute de peur qu'il ne leur arrive quelque chose de soudain et de définitif en dehors de ma présence. On ne sait jamais le moment où on voit les personnes qu'on aime pour la dernière fois. Nous n'arrêtons pas de miser sur leur retour, de parier secrêtement sur un au revoir, de faire comme si les retrouvailles étaient monnaie courante. Plus qu'acquises. En fait, nous sommes de grands joueurs à la petite semaine. L'espérance et le costume qui nous permet de rentrer sans se faire refouler dans cette salle de casino qu'est l'existence, où le hasard nous jauge et nous défie, la chance nous sourit comme une fille de petite vertu, et la Providence nous frôle comme un amour qui reste à conquérir." 

L'auteur >> Jérôme Attal est un touche-à-tout : musique, cinéma, littérature... Il est parolier d'un grand nombre d'artistes (Johnny Hallyday, Eddy Mitchell, Vanessa Paradis, Michel Delpech, Florent Pagny, Garou, Jenifer), scénariste et acteur (Alice Island, 2013, et La Fille aux allumettes, 2009 sur Arte), et également l'auteur de huit romans, dont Pagaille monstre, Folie furieuse et L'Histoire de France racontée aux extra-terrestres, tous trois aujourd'hui chez Pocket, Le voyage près de chez moi (Stéphane Million Editeur), et Presque la Mer (Hugo Roman).

Les éditions Robert Laffont : http://www.laffont.fr/site/page_accueil_site_editions_robert_laffont_&1.html

Comments

[Titine]

Je vais mettre en ligne mon billet demain et je te rejoins totalement. j'ai aimé la douce mélancolie qui s'insinue entre les lignes du polar. Je ne connaissais pas Jérôme Attal avant ce roman mais je vais le suivre dorénavant.

[L'or rouge]

Autant tu avais réussi à me tenter avec Presque la mer que là pas du tout... Le thème ne m'accroche pas du tout, du tout... Mais qu'importe ; j'ai la chance que Presque la mer m'attend encore ;0)